Fleurs CBD interdites en France : le nouvel arrêté polémique de la MILDECA

Le nouvel arrêté tant attendu de la MILDECA vient de tomber : les commerçants ont l’interdiction de vendre de fleurs CBD sur le territoire français. Quels sont les détails de ce nouveau chapitre entourant la loi CBD en France ? Quelles sont les conséquences pour les acteurs du marché ?

Retour sur une décision qui n’a pas tardé à faire réagir l’ensemble des acteurs du CBD français !

Fleurs et feuilles brutes CBD interdites en France

 « Les fleurs et les feuilles […] ne peuvent être récoltées, importées ou utilisées que pour la production industrielle d’extraits de chanvre. Sont notamment interdites la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes sous toutes leurs formes, seules ou en mélange avec d’autres ingrédients, leur détention par les consommateurs et leur consommation. »  

La traduction saute aux yeux : il est désormais interdit d’acheter des fleurs et des feuilles brutes de cannabidiol en France.

Ces mots n’ont rien d’une mauvaise blague que vous retrouvez sur les emballages des papillotes. Ils proviennent d’un nouvel arrêté de la Mission Intergouvernementale de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA) visant à mettre à jour la loi encadrant le CBD en France.

Publié le 31 décembre dans le Journal Officiel, ce texte vise à renforcer la lutte contre les stupéfiants, tout en s’attaquant à la molécule non addictive du cannabis.

Fleurs de CBD outdoor
Fleurs de CBD poussant au soleil

Cette stratégie « prohibitionniste », selon l’Association Française des Producteurs de Cannabinoïdes (AFPC), a bien sûr des conséquences néfastes pour les vendeurs de CBD. Les fleurs CBD représentent à ce jour 50 à 70% du Chiffre des 1500 magasins spécialisés en France. Autant dire que le manque à gagner s’annonce gigantesque pour les commerçants.

Cette disposition de la MILDECA est justifiée par des raisons de santé. La majorité des fleurs CBD sont utilisées en fumette dans des joints. Les effets cancérigènes de ce mode de consommation sont avérés et donc pointés du doigt par l’agence du gouvernement.

De plus, la MILDECA souligne « des motifs d’ordre public, dans la mesure où, pour préserver la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure de lutter contre les stupéfiants, celles-ci doivent pouvoir discriminer simplement les produits, afin de déterminer s’ils relèvent ou non de la politique pénale de lutte contre les stupéfiants. »

Cette excuse est beaucoup plus dure à avaler pour les associations de CBD rappelant que des tests rapides existent sur le marché afin de différencier le CBD du THC.

Un arrêté positif pour les agriculteurs…

Les vendeurs enragent, mais les agriculteurs sont – quelque peu – soulagés. En effet, l’arrêté interdit la vente des fleurs, mais en autorise légalement « la production industrielle d’extraits de chanvre. »

En d’autres termes, les agriculteurs de chanvre ont le droit de faire pousser les fameuses fleurs afin d’extraire la molécule de CBD pour fabriquer des huiles, composer des cosmétiques ou aromatiser les bonbons CBD.

… Ou pas !

La troisième et dernière grosse information à retenir de ce traité concerne la teneur en THC. La dose maximale acceptée augmente en passant de 0,2 à 0,3% dans les produits CBD.

Taux de THC 0,3%
Le taux de THC maximal est désormais de 0,3%

Cette décision n’est pas anecdotique, car les taux de THC et de CBD sont liés. Si le premier augmente, le second croît automatiquement. Désormais, avec 0,3% de THC, les produits peuvent contenir entre 9 et 10% de CBD, contre 6% avec 0,2% de THC.

Dans les faits, les produits seront tous plus dosés en CBD tout en utilisant moins de chanvre.

Cette bonne nouvelle pour les consommateurs, assurés de profiter d’un CBD plus efficace, fait moins rire les agriculteurs. « Aucune variété du catalogue français ou européen n’est actuellement à 0,3%. Ils ne pourront donc pas lancer une culture à 0,3% cette année. Cependant d’autres pays, comme la Chine, premier producteur de chanvre au monde, utilisent déjà des variétés à 0,3% et pourront pénétrer plus facilement le marché européen », rappelle Yann Bisiou, enseignant chercheur en droit et spécialiste en droit de la drogue.

Le CBD France douché par la concurrence étrangère

Comme l’indique Yann Bisiou, la Chine va être favorisée par cet arrêté. Mais pas uniquement. De manière générale, les distributeurs vont se tourner vers les producteurs et vendeurs de l’Union Européenne pour commercialiser les fleurs sur internet.

Le décret crée une situation ubuesque, car les mêmes produits peuvent être légalement importés depuis les autres pays de l’Union Européenne. Non seulement l’Etat français met à mal sa filière locale, mais crée, en outre, une concurrence encore plus déloyale au sein même du vieux continent.

Rappelons enfin que la culture du chanvre est légalisée à 100% dans de nombreux pays européens, tandis que la filière française lutte encore et toujours pour faire reconnaître totalement ses droits.

L’arrêté de la MILDECA ne va pas empêcher les consommateurs de fumer des fleurs de CBD, mais bien détourner le commerce en dehors des frontières tricolores, craignent les associations défendant une production française du CBD.

Nouveau rebondissement attendu le 7 janvier

Les professionnels de la filière du chanvre en France n’ont pas tardé à faire part de leur colère et de leur incompréhension devant le contenu de ce texte sur les réseaux sociaux et les médias spécialisés.

cannabis en france
Le cadre légal du CBD en France : un contexte riche en rebondissements

L’AFPC, l’Union des Professionnels du CBD, le Syndicat Professionnel de Chanvre, entre autres, ont préparé une série de référés et un recours devant le Conseil d’État afin de suspendre cet arrêt polémique.

En outre, les porte-paroles de ces divers collectifs signalent le timing étonnant de la publication de ce texte. En effet, l’interdiction des fleurs est officialisée une semaine avant la très attendue décision du Conseil Constitutionnel à la suite de l’examen de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Ce verdict sera rendu le 7 janvier 2022.

La QPC déposée par L’Association Française des Producteurs de Cannabinoïdes le 28 juillet dernier, conteste le fondement législatif de l’arrêté du 22 août 1990, qui exclut la tige et la fleur de l’autorisation de commerce, de culture, d’importation et d’exportation de certaines variétés de cannabis, considérant qu’il représente un frein à la liberté d’entreprendre, pouvons nous lire sur la page Facebook de l’AFPC.

L’année 2022 débute donc sur les chapeaux de roues pour la filière du chanvre français. L’arrêté de la MILDECA et les décisions de justice qui vont suivre dans les prochains jours symbolisent un peu plus toute la complexité qui encadre la législation du CBD sur le territoire français.

Auteurs:
Vincent Grethen
Vincent Grethen
Rédacteur web et expert en contenu digital, Vincent se met au service de l'or vert afin de répondre aux interrogations des lecteurs de Greentropics !